Lucien Durosoir : Funérailles, Orchestre symphonique international Taurida (*), Orchestre philharmonique de Radio France, Mikhail Golikov.Enregistré en studio à Saint-Pétersbourg (juillet 2017) : Editions Hortus 736 (« Les musiciens et la Grande Guerre », volume XXXVI) 2019
Déjanira, œuvres symphoniques de Lucien Durosoir : Déjanira, étude symphonique. Poème pour violon, alto et orchestre. Suite pour flûte et petit orchestre. Par Taurida International Orchestre, dir. Mikhail Golikov. Adagio pour cordes, par Salzburg Chamber Soloists, dir. Lavard Skou Larsen. Cascavelle, 2019.
Souvenirs. L. Durosoir Berceuse, Samika Honda violon, Emmanuel Christien piano. King International INC, 2018. Fin de siècle. L. Durosoir Vitrail, Lawrence Power alto, Simon Crawford-Philips piano. Musique française pour alto et piano. Hyperion, 2016.
Ombres et lumières. L. Durosoir, Poème pour violon, alto et piano. Ensemble Calliopée, CD Hortus 2016, Collection « Les musiciens et la Grande Guerre ».
Dans la malle du Poilu. L. Durosoir Cinq Aquarelles. Amanda Favier violon, Célimène Daudet piano. Arion 2013.
L’aube des siècles. Hommage à Paul Loyonnet. L. Durosoir Aube, sonate d’été. Piano Daniel Gardiole. CD Corélia/L’Algarade, 2011.
Le Balcon. Œuvres de Lucien Durosoir. Sequenza 9.3, Quatuor Diotima, Trio Hoboken, Quintette Aquilon. CD Alpha 175, 2011.
Jouvence. Œuvres de Lucien Durosoir. Ensemble Calliopée, CD Alpha 164, 2009.
Lucien Durosoir. Quatuors à cordes. Quatuor Diotima. CD Alpha 125, 2007.
Lucien Durosoir. Musique de chambre pour violon et piano. Geneviève Laurenceau violon, Lorène de Ratuld piano. CD Alpha 105, 2006.
Œuvres violon piano
G. Laurenceau
L. de Ratuld
AUTEUR |
EXTRAIT DE PRESSE |
Gramophone
Ivan March | DUROSOIR A small but remarkable output : this Frenchman deserves greater recognition. […] This recording offers his limited but remarkable output for his own instrument, for which he writes hauntingly and with total freedom. […] The memorable two-movement Sonata opens with pensive melancholy but is soon energetically inventive in its abundance of ideas, quixotic in its harmonic shifts and rhythmic impulses.[…] Then the delightfully varied Cinq Aquarelles have such instant appeal that they should find their way into the main repertoire. […] Durosoir is a name to reckon with. |
Le Monde de la Musique
Jean Roy | […] L’œuvre de Lucien Durosoir ne se rattache à aucun courant. Elle est purement personnelle et d’une qualité poétique assez rare. […] une musique où se dévoile, discrète mais affirmée une personnalité des plus attachantes. |
Classica Répertoire
Jacques Bonnaure | […] On pourrait s’attendre à une production timide ou académique. Or pas du tout. Lucien Durosoir fait preuve d’une réelle personnalité. […]Cette musique pourra être qualifiée de " française " à coup sûr par le raffinement harmonique et la délicatesse de l’expression. Mais elle se détourne de l’académisme d’indyste comme du néo-classicisme fréquent après 1920. |
Bulletin de musicologie
Jean-Marc Warszawski | [… Lucien Durosoir […] est ce qu’on appelle chez les musiciens " un compositeur qui entend " Sa musique est extrêmement expressive, variée et contrastée dans ses effets, tour à tour fougueuse, plaintive, cajoleuse, âpre. […] C’est une musique qui tient en éveil, interpelle, qui soutient l’attention […] C’est une musique dense et sans délayage, mais élégante. […] Certes, la musique de Lucien Durosoir est singulière. […] Elle a cette distinction, ce charme, qu’on ne peut imiter sans être grossier, que le barbare ne peut s’approprier sans être ridicule […] |
Diverdi Espagne
Josep Pascual | […]Ahora podemos reconocer en él a un compositor de interés cuyo rescate se impone dado que, según lo que escuchamos en este compacto, merece mucha atención. […]Música muy personal, en ningún momento meramente epigonal pero tampoco un prodigio de audacia ; ni conservadora ni vanguardista, y original a su manera, en una línea que entronca con las muchas personalidades aisladas que han ido salpicando la historia musical del siglo XX, compositores que, como Durosoir, ni miraban atrás ni hacia adelante, y quizá sí hacia adentro. […] |
Les amis de la Musique Française
Lionel Pons | […] toutes les découvertes n’ont pas, loin sen faut, le même intérêt et le même impact que celles-ci. À l’évidence, le parcours de Lucien Durosoir, tard venu à la composition n’est pas celui d’un dilettante doué, mais d’un artiste conscient de ses buts et de ses moyens […]qui ignore délibérément le geste décoratif gratuit. […]. Le compositeur nous fait pénétrer […] au seuil d’une dimension que les mots comme les yeux seraient insuffisants à suggérer. Là se trouve précisément ce qui fait le prix de cette musique discrète et profonde, cette capacité à faire accéder l’auditeur à cet espace intérieur qui lui échappe. […]L’œuvre de Lucien Durosoir conjugue, et c’est une qualité rare, la plus grande rigueur avec une ouverture sur cet espace du dedans cher à Henri Michaux. […] |
Diapason
Philippe Simon | De facture relativement conventionnelle […] pages définitivement marginales.* [1] |
L’éducation musicale
Edith Weber | La musique de chambre de Lucien Durosoir […] s’impose d’emblée par son sens de la mélodie, qualité typiquement française : peinture d’atmosphère, paysages évocateurs, poésie, lyrisme contenu, verve mélodique. […] Remarquable découverte […] d’un musicien français qui gagnerait a être interprété plus souvent, et devant figurer dans toute discothèque de musique française. |
Quatuors à cordes
Quatuor Diotima
Le Monde de la Musique
Jacques Amblard | […] La liberté des lignes, de l’harmonie, échappe de façon étonnante aux univers français de cette période, à Debussy et Ravel autant qu’aux néoclassiques. On croirait retrouver le souffle infini de Chostakovitch, surtout quand Lucien Durosoir se fait sombre, lent et chromatique (ainsi dans l’ " Adagio " du Premier Quatuor). Certains pourraient aussi entendre l’influence d’un Chausson, celui du Poème ou du Concert. Surtout on reconnaît là un maître, dès le Premier Quatuor, dans cette façon de construire des mouvements aux types d’écriture bien contrastés, comprenant notamment un scherzo vraiment original et un finale brillantissime. Le départ du Troisième Quatuor est digne de Stravinsky, son second mouvement, avec ses glissades, de Bartók et. encore de Chostakovitch. Tout cela est presque désespérant ; comment se fait-il qu’on en soit. encore à ne parler, pour cette période de notre histoire, que de Ravel et des amusantes tentatives du groupe des Six ? Durosoir doit absolument être redécouvert. […] |
Classica Répertoire
Jacques Bonnaure | […] La musique de Durosoir est en effet marquée par une très grande science formelle, notamment du point de vue contrapuntique, mais en même temps par un impact émotif immédiat. Comme dans les quatuors de Beethoven, la science la plus aboutie ne tombe jamais dans le formalisme pédant, et l’émotion la plus profonde ne s’exprime jamais dans le kitsch de l’affection. […]Durosoir a un sens aigu de la dramatisation du discours. Il se passe sans cesse quelque chose de neuf dans sa musique. Il n’est donc pas exagéré de considérer ces trois quatuors comme les plus réussis de leur époque. […] |
Bulletin de musicologie
Jean-Marc Warszawski | […] Ces trois quatuors respectivement composés en 1920, 1922, 1934, sonnent et touchent, ils sont dignes du " grand répertoire " comme on dit. Lucien Durosoir […]est un compositeur qui entend. […] La musique de Lucien Durosoir, est fougueuse, impétueuse, parfois furieuse, et tendre. Elle utilise une très grande palette de moyens de variations, faisant à la fois appel à la science de l’écriture et aux ressources virtuoses propres aux instruments. […]Lucien Durosoir est un électron libre, qui ne suit aucune école esthétique constituée […]On pourrait imaginer que ces artistes, œuvrant en dehors des sentiers battus, mais bien dans leur temps, en recul du monde, en sont en fin de compte, la véritable oreille. |
Classictoday-France
Christophe Huss | […] ce disque est littéralement vertigineux. […] les Quatuors de Lucien Durosoir (1878-1955) […] illustrent un pan de la création musicale française, loin de l’élégance de Debussy et Ravel, qui produit des oeuvres ressemblant à un écho grave et amer de la tragédie de la guerre. […] on a l’impression d’entendre ici, quarante ans avant, les prémices des grandes oeuvres de Chostakovitch. […] l’univers de Durosoir est un monde instable où tout est perpétuellement remis en cause. Ce n’est pas le chemin de la facilité auquel nous invite ce compositeur injustement méconnu. Ses compositions reposent sur une image sonore rude due à la trituration du matériau musical et à "l’indépendance dans la fusion" qu’il exige de la part de ses musiciens. Le Quatuor Diotima est à la hauteur de ces défis. Aux auditeurs, maintenant, de gravir les pentes escarpées de ce massif d’une imposante exigence. " |
MusicalCriticism.com
U.K. - William Norris | […]This notion of individualism […] is, essentially, the selling point of this disc. Characterised by concentrated and passionate counterpoint, taut thematic structural integrity, rhythmic ambiguity, and harmonies that oscillate between tonality and atonality, these string quartets defy any attempts at simple classification. Ravel and Bartók most readily spring to mind if one attempts this exercise, but there is also the occasional glimpse over the shoulder to Brahms and towards Shostakovich on the horizon. By the same token, one can readily hear that all three works are from the same genus, that being the inherently unique style that Durosoir cultivated.[…] The Quatuor Diotima proves to be a superb proponent of this repertoire. That no single player stands out above the others is a virtue given that the composer’s dense textures are formed of equally-fiendish intertwining parts. […] the ensemble plays these works with an overflowing profusion of dynamism and with innate musical insight. […]What truly matters here is that these works – intriguing, impassioned, and intellectual – encourage the listener to make new ’discoveries’ on every repeated hearing. It is this aspect of music that keeps us coming back for more. |
Audiophile audition
USA - Steven Ritter | […] his music has a concentrated power and inherent drama that has hints of Debussy, Wagner, and mostly, Ravel, though without the streamlined classical consensus that informs most of that composer’s music.
The three string quartets […]are all intensely focused pieces with a sense that no notes are wasted ; everything he writes has meaning, and one comes away from these works feeling that you get your money’s worth from an hour’s worth of listening, with nothing superfluous thrown in to waste your time. I am not saying that these pieces inspired that same kind of immediate gratification and even love that the quartets of the above "impressionists" command ; but given time and enough repeated hearings, there are lots of things to seduce your emotions and cause you to return to these pieces again and again, always finding something new each time. […] |
Le Devoir
Montréal - Christophe Huss | […] Il arrive à l’édition phonographique de sortir du placard des compositeurs qui auraient pu y rester. Mais parfois elle permet une vrai rencontre avec un créateur injustement oublié. C’est le cas du Français Lucien Durosoir (1878-1955) […] on se situe dans un style français qui n’a que peu à voir avec les courants dominants de la musique du début du XX è siècle dans l’Hexagone. Il y a une fêlure, une blessure, dans la musique e Lucien Durosoir […]une musique parfois noire, parfois déchirée, qui semble anticiper Chostakovitch […]obnubilée par la stature de Debussy et de Ravel, avons nous négligé un élément majeur de la musique française de la fin du premier quart du XX è siècle : la musique exutoire du traumatisme de la Grande Guerre ? […]Lorsqu’il envoie son 1er Quatuor à Caplet, celui-ci est enthousiaste " Je le trouve mille et mille fois plus intéressant que tous les produits dont nous accable le groupe tapageur des nouveaux venus ". Et André Caplet a raison : le disque des quatuors nous révèle des œuvres […] parfois proprement sublimes […] Le temps semble venu de réintégrer son nom dans le dictionnaire des grands créateurs de la musique française, mais aussi de creuser davantage encore le terreau de la création musicale de l’après Grande Guerre, qui n’a, assurément, pas révélé tous ses secrets et toute son importance. |
Swapacd.com
All Music Guide - James Leonard | Lucien Durosoir’s music is like nothing you have ever heard before. […] Durosoir’s music is tonal in orientation but often so chromatic it becomes functionally atonal, contrapuntal in texture with lines so free they become virtually independent, and passionate in expression with emotions so powerful they would overwhelm the music if not for the composer’s complete control of his materials. […] Durosoir’s music is tonal in orientation but often so chromatic it becomes functionally atonal, contrapuntal in texture with lines so free they become virtually independent, and passionate in expression with emotions so powerful they would overwhelm the music if not for the composer’s complete control of his materials. […] Played with amazing confidence and technical assurance by the Quatuor Diotima and recorded in clear, close sound by Alpha, this disc deserves to be heard by everyone who enjoys European chamber music written between the wars. |
Diverdi
Espagne - Jean Marie Viardot | […] Sorprende al escuchar estas obras -de densa elaboración, refinadas texturas sonoras y minucioso encaje contrapuntístico- lo alejado que su autor se muestra de lo que entonces era norma entre los músicos franceses de la época. Ni heredero de los impresionistas, ni epígono de la escuela franckista, ni próximo a los jóvenes neoclásicos que entonces surgían con fuerza, Durosoir, alumno de Tournemire y amigo de Caplet, se muestra tan independiente y, en cierta medida, extemporáneo, como ellos. […] atmósferas desoladas, casi depresivas, que harían pensar en Shostakovich ; afiladas sec uencias rítmicas (el comienzo del Cuarteto nº 3, por ejemplo) deudoras de Stravinski y sutiles efectos tímbricos (glissandos, sordinas, pizzicatos, sul ponticello) que remiten inmediatamente a su coetáneo Bartók. Y todo ello envuelto en un manto de interioridad austera y descarnada que no deja de recordarnos al Fauré más secreto, el de sus raras veces escuchadas obras finales. […] |
Audiophile melomane
T. Herve | […]C’est une musique éminemment personnelle, où l’inspiration et la lucidité sont rehaussées par un implacable pouvoir de conviction. Écrites dans la force de l’âge et sans se plier à l’esthétique et aux modes de son temps, ces pièces s’expriment dans un dialecte aux sonorités riches et travaillées, souvent graves (les mouvements lents) et incisives, traduisant précisément les dispositions psychiques de leur auteur. C’est aussi une musique dans laquelle il se passe toujours quelque chose. […]cette musique réunit tout ce qu’il faut pour éveiller la curiosité des vrais amoureux de la musique. À bien y réfléchir, elle se place dans l’ombre d’aucune autre ; l’écoute de ce disque incontournable aurait même tendance à prouver le contraire. |
La libre Belgique
lalibre.be | […] retrouver Lucien Durosoir dans trois chefs-d’œuvre inconnus, c’est un choc […] des œuvres écrites entre 1919 et 1934, inspirées par l’épreuve, mais savantes et fortes […] française par sa rhétorique, cette musique évoque aussi Chostakovitch par son âpreté, sa complexité, ses alternances de révolte et de résignation poignante, sa liberté |
Diapason
Jean Cabourg | […] en deçà des audaces de Caplet, le fidèle mentor, et plus proche d’un dernier Fauré laborieux, voire d’un Franck brouillon que de Roussel. […] Trop moderne pour de l’ancien, trop ancien pour du moderne* […] [2] |
Jouvence et autres Œuvres de musique de chambre
Ensemble Calliopée
Direction Karine Lethiec
classiqueinfo-disque
Fred Audin | La sortie du troisième disque consacré à la musique de chambre de Lucien Durosoir ne fait que confirmer avec plus d’éclat encore qu’il s’agit d’une des découvertes les plus importantes de ce début de siècle, tout juste 55 ans après la mort de l’auteur […] La musique que composa Durosoir ne ressemble à rien d’autre de ce qui s’écrivit entre 1920 et 1950, en France ou ailleurs, et toutes les comparaisons ne sauraient en donner qu’une idée lointaine. De là, la difficulté qu’on peut éprouver à la saisir, même si elle ne présente pas de difficulté d’accès. Sa singularité, l’absence de désir de séduire et le choix volontaire de l’obscurité que fit Durosoir après une carrière brillante au service de musiques inconnues (qu’il révéla aux futurs acteurs du conflit majeur du XXème siècle, concertos de Brahms, Richard Strauss ignorés des français, musique de chambre française méprisée par l’Allemagne) rendent particulièrement émouvantes son aspiration à composer dans le silence et pour le tiroir, comme la mise en acte d’un projet philosophique, une réflexion sur la condition humaine, dans une réclusion d’ermite, dégagée de toute référence à une dimension religieuse ou politique, manifestions sociales d’avance condamnées par la confrontation à la réalité des expériences de guerre. […] il faut au moins prendre connaissance du Nonette Jouvence, qui est, sans l’ombre d’un doute, une pièce majeure de la musique française du siècle dernier, dans un dispositif que nul autre compositeur n’a utilisé (quatuor à cordes, contrebasse, harpe, cor, flûte et violon principal). Cette symphonie de chambre à la tonalité fluctuante évolue, malgré une marche funèbre s’enchaînant au final, dans un mode majoritairement majeur : le poème des Conquérants d’Hérédia auquel elle se réfère ne saurait faire programme et n’explique que l’ambiance maritime et la tardive allusion au registre héroïque du cor, la citation du texte ne venant qu’appuyer l’idée d’une thématique de l’illusion, le symbole de la « rejuvénation » étant, comme l’horizon, une ligne idéale qui s’éloigne à mesure qu’on en approche. L’orchestration, vaste et claire, les mélodies modales trahissent l’influence de Caplet, tout en évoquant les couleurs de Jean Cras et parfois d’Ibert, dans l’idée de voyage cinématographique qui s’empare soudain de la coda surprenante du premier mouvement. L’Aria centrale où le violon assume plus directement son rôle « principal » flirte avec l’atonalité. On croirait parfois dans le dernier mouvement que le Soldat de Stravinsky ou l’expressionnisme de Schönberg ont été mis consciemment à contribution, à moins que ce ne soit le souvenir des Clairières dans le ciel de Lili Boulanger qui traverse ces pages, aussi osées que certains Paysages et marines de Koechlin, et dont l’orientation est plus contemplative que narrative […] Malgré la dédicace « A Maurice Maréchal, en souvenir de Génicourt (hiver 1916-1917) »[…] on n’est ni dans l’atmosphère du salon, ni des hangars ouverts à tout vent où répétait le trio Durosoir-Caplet-Maréchal , mais plutôt au jardin dans ce Caprice pour violoncelle et harpe à l’ambiance printanière et ensoleillée. La grande phrase lyrique pour le violoncelle qui commence seul, s’évadant dans l’aigu, enchaîne sur un développement d’une grande liberté, d’une gaieté paisible et presque sans ombre, qui contraste avec l’inquiétude des pièces de 1934, Berceuse (plus tard dénommée « funèbre » par Durosoir après qu’il la réécrivit sous forme de Chant élégiaque à la mémoire de Ginette Neveu), Au vent des Landes, pour flûte et piano, paysage instable où souffle à nouveau « le vent mauvais qui m’emporte », que l’invocation de Vitrail pour alto écrit dans la demeure familiale des Landes où Durosoir avait définitivement élu domicile, ne suffit pas à éloigner. La mort de sa mère, depuis longtemps infirme, et la rumeur du monde où le tragique enchaînement de la haine recommence à grandir sont-elles étrangères à ces élans de révolte devant l’inéluctable ? Le silence leur succède et Durosoir ne reprendra la plume qu’en 1946, écrivant après Trois préludes pour orgue, l’Incantation bouddhique pour cor anglais et piano, quatre minutes d’un mantra fantasmé où des suites d’accords et d’arpèges tournent en rond comme dans les Poèmes Hindous de Maurice Delage, sans trouver la certitude d’une libération ailleurs que dans une constante recherche. Deuxième oeuvre exceptionnelle de ce disque, le Quintette pour piano et cordes date des années 1924-1925. Pendant quelques minutes c’est un quatuor, avant que le piano ne reprenne discrètement la phrase d’ouverture sur fond de pizzicati des cordes, multipliant les tempi changeants comme une suite de phases de rêves agités allant de l’idylle au cauchemar. Le dispositif de cette pièce rappelle forcément la série de grands quintettes d’avant 1914 (Franck, Schmitt, Huré, le Flem, Fauré) mais traite le genre avec un sens de la forme très différent, dispersant ses thèmes fragmentés en un kaléidoscope d’idées fantasques, dont les chatoiements réclament autant d’écoutes avant d’en reconstituer la trame pourtant solidement tissée. Le Nocturne central ne quitte pas le domaine onirique, introduisant dans un paysage méditerranéen (les deux premiers mouvements furent écrits à Bormes les Mimosas) aux ruissellements de vagues mélangeant les inspirations celtiques et hispanisantes, des souvenirs de blues comparables à ceux qu’utilisera Ravel dans le deuxième mouvement de sa sonate pour violon. Le Finale surgit sur un puissant thème, noté Impérieux, énoncé par les cordes à l’unisson dans des rythmes impairs qui reprennent les bribes, les ruines a-t-on envie de dire, du Nocturne précédent, pour les transfigurer dans une suite de fragments de danses, qui empruntent autant à la valse qu’au café-concert, remugles d’un monde, pour Durosoir déjà lointain, qui tente d’oublier les drames sur lesquels il essaye de se reconstruire. Rêves passionnés, semés de troublant silences, éclairés, comme au soulagement du réveil, un matin très tôt, dans une chambre qu’on ne reconnaît pas, par une courte coda en majeur qui dissipe les apparitions fantomatiques d’une nuit de fièvre.[…] Excellent livret, illustrations à avenant, interprétation irréprochable : un disque qui vaut bien son prix, et en supplément, donne à réfléchir. |
Classica
Jacques Bonnaure | Avec les deux volumes déjà consacrés par Alpha à Durosoir, on a pu découvrir un compositeur naguère quasiment inconnu mais de grand talent […] Le troisième volume réunit sept œuvres de musique de chambre, dont une œuvre particulièrement originale, Jouvence. Il s’agit d’une sorte de concerto pour violon et octuor à vents, portant en exergue un sonnet de Heredia, héroïque à souhait. Mais ici, l’héroïsme du violon solo est mis à distance, avec une ironie semblable à celle de Mahler. Nous sommes en 1921. La guerre est passée avec ses horreurs. L’héroïsme parnassien du poème n’est plus de saison. Autre pièce de choix, le Quintette pour piano et cordes(1925), œuvre atypique parmi les quintettes français. La forme en est classique mais son contenu peu académique, par le traitement subtil et versatile des thèmes. Le reste du programme n’est pas négligeable. Le Caprice pour violoncelle et harpe (1921) d’un sobre lyrisme témoigne de l’amitié unissant Lucien Durosoir au violoncelliste Maurice Maréchal, son compagnon de guerre. La Berceuse pour flûte (1934), composée peu avant la mort de sa mère, est plutôt un chant funèbre. L’Incantation bouddhique, plus tardive (1946) porte la marque des préoccupations spirituelles du compositeur à la fin de sa vie. Vitrail pour alto et piano(1934), très bref, semble animé d’un mouvement constant, comme le ferait un œil parcourant les touches multicolores d’une rosace. La même agitation se retrouve dans Au vent des Landes pour flûte et piano (1935), où Lucien Durosoir évoque brièvement "ce qu’a vu le vent d’ouest". […] |
ConcertoNet
Sébastien Foucart | […] Jouvence (1921), sous-titrée « fantaisie pour violon principal et octuor » est une curiosité […] Cet ouvrage bien français de ton déroute, que l’écoute s’effectue avec ou sans le support littéraire […] le Quintette pour piano et cordes (1925) dévoile, comme Jouvence, une personnalité affirmée. Dense mais clair et cohérent, cet ouvrage recherché, notamment au niveau thématique, se distingue par un langage plutôt original, souvent étonnant. Durosoir alterne les états d’âme de façon contrastée (exaltation, introversion) et varie avec versatilité les tempi et la dynamique. Une musique de caractère et essentielle … |
Le Balcon
Kareen Durand , Jean-Christophe Jacques, Raphaël Merlin, Yann Dubost, Jeff Cohen, Johan Farjot, Sequenza 9.3, Catherine Simonpiétri (direction), Membres du Quintette Aquilon, Quatuor Diotima, Trio Hoboken
ConcertoNet
Sebastien Foucart | […]Balcon (1924) […] « poème symphonique pour basse solo, cordes vocales et cordes instrumentales » […] se caractérise par un langage travaillé et sans concession[…] Idylle (1925) réunit un quatuor à vents (flûte, clarinette, cor et basson) : musique d’un « impressionnisme fortement coloré », […] d’une belle vitalité organique […] Ce compositeur ne se contentait pas d’aligner des notes, comme le prouve le Trio pour piano, violon et violoncelle (1926-1927) qui mérite d’être défendu au disque mais aussi au concert tellement cette œuvre est profonde et recherchée, bien qu’elle ne dévoile ses merveilles que progressivement. Le contrepoint se dissout, la mélodie se rompt, le registre évolue souvent dans les aigus. Le Trio Hoboken lui confère exactitude et clarté, ce qu’exige absolument cette musique pour qu’elle se révèle pleinement. […] ce beau disque par excellence […] porte haut la bannière de la musique française, en fin de compte méconnue. |
Classica
Jacques Bonnaure | Ce quatrième volume des œuvres de Lucien Durosoir, nous révèle encore son lot de pages étonnantes. Incontestablement, ce compositeur naguère inconnu fut un créateur indépendant de premier ordre, éloigné de tout ce qui se faisait dans la musique française de son temps. Prenons par exemple Le Balcon (poème symphonique pour basse solo, cordes vocales et cordes instrumentales, 1924). Il s’agit de la mise en musique du célèbre poème de Baudelaire traité de manière très originale, les cordes vocales » se limitant à des interventions sans texte tandis que le quintette à cordes tisse une atmosphère étrange parfois à la limite de la tonalité. Ce n’est pas l’atonalisme souvent acide des Viennois mais un sentiment harmonique doux et lyrique, qui parcourt Idylle pour instruments à vents (1925), très loin du néo-classicisme en vogue chez les jeunes Français de l’époque. Un an plus tard, le Trio en si mineur opte pour la grande forme, non à la manière plus ou moins académique des disciples de Vincent d’Indy, mais dans une perspective extrêmement innovante. Dans la notice Georgie Durosoir n’a pas tort de parler de « structure brisée » et d’écriture déconstruite », malgré la présence de trois mouvements classiques. Comme les Quatuors, ce Trio marque vraisemblablement l’apogée de l’œuvre du compositeur. La Trilogie pour violoncelle et piano (Improvisation, Maïade et Divertissement, 1931) est dédiée à Maurice Maréchal que Durosoir avait connu pendant la Guerre. L’harmonie en est moins flottante que dans les pièces précédentes et les formes plus nettement cernées. Deux pièces de moindre portée, une belle mélodie Sonnet à un enfant (1930) sur un poème de Raymond de la Tailhède, et la Berceuse pour violoncelle et piano, complètent le programme. Tous les interprètes sans exception sont de haut niveau et se sont magnifiquement investis dans ces étonnantes redécouvertes |
Classiqueinfo
Fred Audin | Voici, émanant du même label Alpha que les trois volumes précédents, la nouvelle révélation de la musique de Lucien Durosoir, collection d’œuvres, toutes inédites, exigeantes tant pour les interprètes que pour l’auditeur, mais toujours aussi gratifiantes si l’on s’y penche suffisamment pour en pénétrer la mystérieuse étrangeté et la radicale originalité.[…] C’est le cas du poème symphonique avec basse solo, Le Balcon qui donne son titre au volume, mise en musique du poème de Baudelaire déjà employé par Debussy, mais qui dépasse le cadre de la mélodie classique, par son ampleur comme par l’emploi qu’il fait des " cordes vocales ", voix de femmes sans paroles s’unissant aux cordes instrumentales d’un quatuor augmenté d’ une contrebasse. […] Les trois pupitres de voix féminines par trois (l’ensemble Sequenza 9.3) contrebalancent la voix principale de basse à laquelle est dévolu le texte, se manifestant par des interventions assez brèves qui délimitent les strophes ou soulignent d’ornements à la manière des madrigalistes, quelques mots choisis du poème. Mais cet instrumentum n’est pas le seul élément d’étrangeté dans la pièce : les fragments tonals sont accompagnés d’harmonies toujours à la limite de la tonalité, dont on serait bien en peine de trouver en 1924 l’équivalent dans la musique française. La prosodie, proche par moments du sprechgesang, est aussi d’une complète originalité […]. Les rythmes internes connaissent aussi un traitement inédit, le tempo s’alanguissant progressivement à mesure que la voix de basse soutenue par des soli de cordes inattendus atteint des notes dans l’aigu […]. Tout cela est si étonnant, à la fois extatique et angoissé, qu’il faudra certainement des écoutes répétées pour s’y accoutumer : il apparaît de plus en plus certain, que dans une sûreté de facture complètement indépendante des réactions d’un public potentiel, Durosoir n’a jamais écrit deux fois la même chose, envisageant l’évolution de la musique avec un tel détachement du temps de sa composition que son traitement des structures et des textures paraît relever parfois de la divination. […] Dans Idylle […], Durosoir voulait-il vraiment illustrer le poème de Chénier que Georgie Durosoir cite en exergue dans la notice ? Chénier, cet autre visionnaire resté un demi-siècle dans les tiroirs avant que son aura n’illumine toute la poésie romantique ? Ce quatuor pour flûte, clarinette, cor et basson mélange la vision d’un tableau statique de nature morte et de multiples petites cellules explosives telles des capsules de graines dispersées au soleil (le motif répété sautant d’un intervalle de septième, les sextolets de doubles croches, les trilles apparaissant aux moments les plus incongrus). La conception n’est plus impressionniste, elle rappelle celle des compositions géométriques abstraites et incroyablement colorées de Kandinsky où des formes organiques sont clairement identifiables sans qu’on les reconnaisse. […]. Le Trio, basé sur une répétition obsessionnelle d’un motif d’accompagnement énoncé au piano exerce la même fascination irréductible à l’analyse avec ses mélodies disloquées disposées en kaléidoscope, comme une sorte de pantoum entêtant. Le violoncelle, à qui sont réclamés dans le premier mouvement des cris stridents d’accords plaqués est appelé à se fondre avec le violon (les deux instruments à cordes échangeant parfois leur registre et leur rôle) dans un mouvement lent parcouru d’éclats presto intempestifs, qui arrêtent cette dérive de nuages estivaux par de soudains éclairs d’orage, prenant des détours par des tonalités dont les rapports échappent à toute attente. La dilution n’est jamais floue, plutôt divisionniste par un système de juxtaposition de plans d’une netteté tranchante dans une métrique constamment mouvante. Le finale est un précipité de traits virtuoses, comme une superposition d’improvisations à la limite du jazz, usant de moyens d’expression complètement inédits et qui ne se plient que par accident à des règles préétablies, délivrant ça et là une phrase romantique rapidement estompée, comme biffée par les inflorescences d’un jet d’encre fantasque. Le Trio Hoboken (dont on retrouve deux des membres dans la Berceuse transcrite des Aquarelles, qui porte la durée du disque à près de 80 minutes) est brillant par la lisibilité et l’enthousiasme qu’ils réussissent à introduire dans cette partition d’une difficulté redoutable. Mais c’est à un autre violoncelliste de talent, Raphaël Merlin, qu’échoit la tâche complexe d’enregistrer La Trilogie (Improvisation, Maïade, Divertissement) dont le dédicataire, Maurice Maréchal, pourtant l’un des grands virtuoses de son temps, plaisanta le titre de la partie conclusive (" Vous ne manquez pas d’ironie d’appeler ça Divertissement… Bon Dieu ! que c’est difficile ! "), soulignait que l’agrément n’est que pour l’auditeur , qui y trouvera peut-être une ligne plus immédiatement compréhensible, la facture rappelant Franck dans le mouvement médian, et comprenant des mélodies suaves aux allures parfois curieusement orientales pour une pièce inspirée par les Landes. Tout aussi dépaysante, la courte mélodie Sonnet à un enfant rejoint la mystérieuse complexité du Balcon, cherchant à se frayer un chemin vers la " flamme orientale de l’aurore " à travers la sombre tonalité de si bémol mineur et les hésitations de son piano scriabinien qui soutient une ligne vocale sinueuse de prière védique. On ne peut même pas se risquer à affirmer que ce soit beau : c’est juste unique. Cette musique existe en soi, pour soi, et se fiche absolument de ce qu’on en pense. Un autre monde, là, à moins d’un jet de pierre, qui ne vous invite même pas à y risquer un pied : Fais ce que voudras. |